En hommage à Samuel Beckett la galerie La Hune-Brenner présente une exposition, du 22 février au 24 mars 2007, de lithographies de Bram van Velde, de gravures et livres de Christine Gendre Bergère. Samuel Beckett écrit à la commande au début de 1945 un article qu'il titre étonnament "Le monde et le pantalon" , sur la peinture des frères Abraham et Gerardus van Velde qui exposent respectivement aux galeries Mai et Maeght . Son titre vient d'une plaisanterie reprise en 1957 dans Fin de partie et citée en exergue : LE CLIENT : Dieu a fait le monde en six jours, et vous, vous n'êtes pas foutu de me faire un pantalon en six mois. LE TAILLEUR : Mais, Monsieur, regardez le monde, et regardez votre pantalon. Ce texte jubilatoire et émaillé d'humour fonde l'amitié entre l'écrivain et l'artiste, les deux hommes ont en commun une intégrité intellectuelle, une grande force expressive. Beckett annonce avec une ironie prémonitoire : "Car on ne fait que commencer à déconner sur les frères van Velde. J'ouvre la série. C'est un honneur. " Beckett pressent l'analogie dans la démarche et le travail entre l'écrivain et le peintre : "ce qui suit ne sera qu'une défiguration verbale, voire un assassinat verbal, d'émotions qui, je le sais bien, ne regardent que moi ». Beckett exerce son regard : " C'est là qu'on commence enfin à voir, dans le noir. Dans le noir qui ne craint plus aucune aube. Dans le noir qui est aube et midi et soir et nuit d'un ciel vide, d'une terre fixe. Dans le noir qui éclaire l'esprit. " Beckett réfléchit librement sur l'art :
" cette peinture solitaire, solitaire de la solitude qui se couvre la tête, de la solitude qui tend les bras" La rencontre de Bram van Velde avec Samuel Beckett a bien sûr été déterminante pour l'artiste qui peinait à obtenir une reconnaissance de son travail en peinture. Beckett a beaucoup soutenu van Velde qui en retour lui a offert toute son admiration. Il est donc naturel qu'un hommage à Samuel Beckett soit accompagné par les lithographies de Bram van Velde. Christine Gendre-Bergère quand à elle, est graveur. C' est une lectrice scrupuleuse de Beckett. Elle choisit et retient au fil des textes, quelques lignes qu'elle cerne à la manière noire de ses propres traits. Après son "Around Molloy" en 2004, elle vient de réaliser "Images gravées - hommage à Samuel Beckett", un port-folio comprenant 10 gravures originales et un cahier de 4 pages qui propose pour chaque estampe une citation du texte dont elle est inspirée. Le tirage de l'ouvrage ne comprend que 10 exemplaires. | "Je... Comment lire ? Comme on veut. Au contraire de Dujardin, ou de Joyce, l'Irlandais se laisse posséder, ce qui contribue à son universalité. Les millions de mots accumulés par lui forment le silence. C'est paradoxal. Mais chacun peut s'y laver comme il l'entend, le filet de sa voix est assez mince." | | C'est Jean Réal qui s'exprime ainsi , dans son introduction aux Images gravées de Christine Gendre-Bergère, ce pourrait-être l'artiste elle-même qui "a circulé" sur les mots de Beckett et dont "la gravure a retenu la perplexité". Les gravures de Christine Gendre-Bergère ainsi que ses livres d'artiste sont exposés au côté des lithographies de Bram van Velde dans l'exposition "En hommage à Samuel Beckett" du 22 février au 24 mars à la galerie La Hune-Brenner à Paris. |