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3 janvier 2007 3 03 /01 /janvier /2007 09:19
(Petite méditation en forme d’ouvroir)
 

1
L’herméneutique  est la science de l’interprétation des textes  philosophiques et religieux, basée sur le déchiffrement du sens caché dans les images , symboles etc
Il nous apparaît aujourd’hui que l’anthropologie aurait tout à gagner à penser l’homme « comme un Texte » .C’est à dire à déchiffrer le sens qui le constitue à son insu. Le problème serait alors de pouvoir énoncer les critères de cette interprétation. Ceux-ci devraient reposer sur un pacte de vérité entre soi et soi. Reconnaître par exemple que ce que l’on dit, ce que l’on fait, ce que l’on désire est déjà là en puissance  et que cela fait sens dans une logique secrète . Mais alors, comme dirait Spinoza, la liberté consiste à savoir ce qui nous détermine. Il semblerait que chacun possède sa formule propre du bonheur. L’herméneutique de soi n’est que le lent travail de traduction de cette formule à la conscience.
L’art notamment se révèle être pour le créateur un précieux médiateur dans le cheminement vers la connaissance de soi et de notre destination. Il est probable que la culture en général  énonce le « texte » de l’humanité en devenir ; voire que l’humanité soit le texte de Dieu  comme le pensaient les disciples de Hegel. Nous pensons cependant  que cette généralisation est un peu hasardeuse.Il demeure cependant énigmatique que selon un constat assez général, chacun accommode à peu près le destin à ce qu’il désire et que l’humanité s’efforce de faire de même envers et contre tout. Ainsi J.L.Borgès a pu écrire que l’homme était le rêve d’un dieu. Et si l’homme était d’abord le rêve de l’homme ?
Et si l’humanité se rêvait sans cesse d’une génération à l’autre ?
Dans ce cas le « texte » dont on parle ne serait autre que celui qu’ont écrit « nos prédecesseurs » selon le mot de Pascal dans le Traité du Vide, et qu’il nous incombe de prendre en charge d’une quelconque manière.


2
Et si tout l'art de vivre consistait à additionner les expériences. Non pas les nier dans la soustraction, non pas les multiplier dans la totalisation, mais les ajouter sans complaisance. Car celui qui se complaît dans une même expérience fait tout aussi bien acte de narcissisme plus ou moins larmoyant, infantilisme et manque de sens critique. Attention  à l'ankilose et au kyste de l'âme par absence de gymnastique mentale. Nier l'expérience c'est  encore s'amputer d'une partie de soi  et aboutir au handicap et au boîtement ... au risque d' emboîter le pas au premier venu par aveuglement volontaire. Enfin celui qui totalise l'expérience en fait une abstraction et par là en perd la saveur, la richesse propre et la matière. Ajouter l'expérience c'est donc enrichir le vécu, le multiplier sans l'oublier, croître dans le monde en faisant croître en soi la vie .
Prenons un exemple, celui de l'expérience amoureuse. Nous ne reviendrons pas sur toutes les formes de l'échec amoureux par ankylose, handicap ou abstraction. La reussite amoureuse consiste à ajouter quelque chose à l'expérience antérieure en la comprenant mieux  .La question n'est pas de changer de partenaires, mais de savoir ce qui dans la relation déjà existante est à découvrir et à révéler aussi. Tel est sans doute l'art d'aimer ; une des modalités de l'art de vivre .


3
Qu'en est-il enfin de l'immortalité de l'âme ?


Le postulat est, je pense, d'origine expérimentale. L'intuition vient progressivement à l'esprit d'une autonomie de la pensée qui perdure, s'affine, se cristalise, s'épure, colle à quelques objets, s'imprègne d'un monde, son monde, le monde. Face à cela le corps s'use, se fatigue , dépérit progressivement, comme si le temps pesait sur lui invariablement. Le temps justement. Le temps sert l'âme qu'il rapproche  petit à petit  de son but, supporte, allège... Mais il dessert  le corps qu'il alourdit , déforme, afflige. Ainsi l'âme se saisit librement , se sent comme éternelle, plus près de sa vérité, de la vérité d'une vie. Le corps, lui, disparaît dans le néant. Ce qui subsiste avec la mort c'est justement l'atmosphère propre d'une personne, l'aura de sa manifestation. L'âme dure .Le dur noyau de la vie individuelle ne s'oublie pas et informe l'esprit de ceux qui survivent.


4
Les deux voies de la morale.


Il y a une aventure de la pensée qui ne passe pas ,bien sûr , par les conventions de pensée. Par exemple la pensée de la "place vide" ;celle de l'imperfection dont nous parle Michaux à propos d'un récit chinois, je crois et qui rejoint sans doute "l'inachevé " de Jankélévitch. Mais qu'est-ce donc que cette place vide sinon celle de l'hôte qui est toujours l'étranger possible dans la demeure. En effet il n'y a de progrès que par là, c'est à dire par l'ouverture à l'altérité. C'est sans doute cela qui fonde l'histoire .Levi-strauss aussi définit le progrès des sociétés par les frottements qui réchauffent les sociétés "froides". A titre individuel l'humain évolue par là aussi. Par la recontre et en allant vers... Le soi n'est jamais autre chose que la résultante de ce contact. Tel le silex la conscience se brûle à l'autre .Où l'on retrouve Sartre  en quelque sorte, mais sans pathos tragique.
Le jeu fonde donc le je, lequel déborde de nouveau en créant de nouvelles règles, de nouveaux rapports sociaux. Ceux qui cherchent le plein, l'achèvement, la perfection, ignorent les modalités du vivre ensemble. Ce sont les gardiens des portes du néant et ils nous indiquent la voie de l'enfer sur le plan politique. Les partisans de la place vide  sont quant à eux  les seuls promoteurs du "paradis" qui vaille pour "les fils de la terre".


PG

 

 

Pierre Givodan - contact@pierregivodan.com

Chroniques intempestives

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