Du désir au don Une pensée de la vie intense Il est un philosophe dont la lecture prodigue de la joie et diffuse une générosité communicative. Nicolas Grimaldi vient d’écrire le Livre de Judas ( PUF 2006), dans lequel il médite sur « ce qui rend la vie semblable à une création » . L’annonce de la bonne nouvelle réside ici dans le fait de nous rappeler qu’aucune promesse Métaphysique, religieuse, historique ou politique, de même qu’aucune élection ( individuelle ou collective), qu’aucun avenir béatifique n’est à attendre de l’histoire de l’humanité dans son ensemble. Non pas que cela doive nous conduire au pessimisme tragique , mais bien au contraire ! La plénitude individuelle ne sera jamais à comprendre selon l’ordre de la « représentation » Mais plutôt selon celui du vécu. Qu’est-ce à dire ? Je cite l’auteur : « …aucune graine ne devient arbre que par un perpétuel travail sur soi-même , tirant de ce qu’on est toujours plus que ce qu’on était .C’est ce qui rend la vie si semblable à une création ».Tout est donc affaire de disposition d’esprit , de disponibilité à son « intensité », sa « diffusion particulière ». C’est ainsi que Nicolas Grimaldi peut rappeler que le « royaume » n’est pas ailleurs, mais ici, maintenant, pour chacun, dans la défaillance et le vacillement. L’enjeu est dans le renversement de perspective qui consiste à penser le don en nous avant de chercher à recevoir à tout prix des autres, du monde , etc. Judas par exemple était dans la « propriété », Jésus dans son contraire : répandre une « surabondance » de vie. Aimer tout simplement. Ce long travail entamé par Grimaldi autour du sens de la vie « comme temps de l’amour , toujours à son premier matin « (Bref Traité du désenchantement ,1998) est là pour nous préserver du désir qui cherche toujours à recevoir avant de donner et qui se rassasie d’abord et exclusivement de soi. Seule parade au désirs d’ailleurs, son devenir « musical ». « Seule la musique réussit en effet à résoudre la contradiction du désir » (Bref Traité…) Mais cette parade doit elle-même être une propédeutique à la vie . On ne peut en effet chercher dans la vie ce qu’on trouve fantasmatiquement dans l’art. L’art nous sensibilise au réel, mais ne doit pas le remplacer. Seul l’amour comme don authentique nous permet d’accueillir l’éphémère, le fragile, l’irremplaçable instant comme vraiment notre bien propre. PG |